Les Baléares
"L'important, c'est d'être en route" disait
Bernard Moitessier. C'est ce que nous voulons, mais il nous aura fallu attendre
plus que nous le souhaitions. En premier lieu, les cours du Cned sont arrivés à
peu près dans les temps indiqués, certes, mais un des colis n'était pas complet.
Nous avons dû attendre encore que les cours manquants nous parviennent. Mais ne
nous plaignions pas trop certains équipages les reçoivent en septembre, voire
plus tard. Pour
prendre notre mal en patience, nous sommes allés passer quelques jours à
Porquerolles, histoire de nous détendre. L'eau étant à 16°, inutile de vous dire
que nous ne nous y sommes pas jetés comme des fous ! Seule Mégane, au "chaud" dans
son combi short et
avec
des chaussons de plongée s'y est risquée... et est très rapidement remontée !
Nous avons profité de ce temps libre pour lire, nous reposer et "battre le carton" avec les
filles ! Au retour, notre moteur Peugeot nous semble faire un bruit de 2 CV !
L'alternateur avait déjà éjecté sa courroie à deux reprises ! Nous tendons
l'oreille, mais rien n'y fait. Nous ne voyons pas d'où cela peut venir. Au port,
l'investigation ne donne rien de plus. Nous allons donc au mouillage jusqu'à
l'anse Méjean dans la grande rade de Toulon pour plonger sous la coque. L'aller
se fait au moteur, faute de vent. La plongée en apnée ne donne rien de plus.
Jean-Michel décide de s'équiper avec la bouteille pour voir tout cela tranquillement. Le
vent étant monté, à 13 h, nous avons 12 à 15 Noeuds de vent au mouillage. Nous
décidons de rejoindre Saint-Mandrier où le bateau ne bougera pas autant
pour une plongée plus sereine. Au démarrage du moteur, un bruit très étrange de
frottement, sifflement vient de la ligne d'arbre, ou est-ce de l'inverseur ? Il
nous est désormais impossible d'utiliser le moteur, au risque d'aggraver la
situation. Nous appareillons à la voile et
évitons de justesse un petit bateau moteur qui ne comprend rien à notre
manoeuvre car nous avons gardé le moteur en marche afin de ne pas manquer
d'énergie pour remonter rapidement notre mouillage au guindeau élctrique. Le temps de tirer quelques bords et
de rejoindre Saint-Mandrier, le vent est monté à 35 noeuds dans la passe, ce qui
nous occasionnera quantité de manoeuvres de voiles pour s'adapter au vent
changeant.
Lorsque nous arrivons près du port de Toulon, le personnel du club nautique de
la Marine vient nous prendre en remorque et nous aider à nous mettre à quai.
Jean-Michel prend rapidement contact avec la société Maintenance Plaisance 83
qui l'aide à analyser la panne. Les instructions données par téléphone sont
suivies et la conclusion est moins dramatique que redoutée : le tourteau est à
changer (c'est la pièce qui permet la liaison entre la ligne d'arbre et le
moteur) ! Ouf, cela est dans nos cordes ! Nous mettons notre famille à contribution
pour nous véhiculer car notre voiture s'en est allée avec son nouveau
propriétaire. Un grand merci à Sébastien, Hervé et Maryse qui nous ont bien
aidés. Une demi-journée de travail sans pose et le nouveau tourteau a
remplacé l'ancien. Nous faisons les essais à quai, toutes oreilles tendues et
dès que la météo nous le permet, nous faisons de même en mer. Tout va bien :
plus de bruit suspect !
Cette fois, nous sommes prêts pour le départ. Seulement, les dépressions se succèdent sans répit dans le Golfe de Gènes, ce qui signifie pour nous des BMS sans discontinuer. Lorsqu'une accalmie se présente, le sort s'acharne : vent dans le nez jusqu'à 20 noeuds ; nous n'aimons pas faire du moteur et Semeda n'est pas un voilier de régate qui remonte au vent. Conclusion : patience, le vent nous sera bien un jour favorable ! Le 19 Août ce jour arrive enfin et nous appareillons au petit matin, tandis que Toulon se réveille. Nous regardons les bateaux du club défiler sous nos yeux. Le cap est mis sur les Baléares. Dès que nous passons la presqu'île, nous envoyons des sms à nos famille et amis afin de les informer de notre départ. En effet nous ne souhaitions pas de présence sur le quai afin de ne pas charger d'émotions supplémentaires ce moment. Nous avons eu assez d'émotions en quittant notre famille et nos amis, et nous avons versé assez de larmes lorsque nous avons raccompagné notre fiston préféré. Mais nous savions que ce serait un moment incontournable de notre aventure et nous en avions accepté la douleur.
Cette première journée de navigation se passe à la voile avec un vent de 12 noeuds et ce n'est que le soir que nous faisons route au moteur. Nous avions pris soin de préparer une succulente quiche lorraine qui n'a pas fait la fière ! La nuit fût calme, peu de navire. Au petit matin je confonds le lever de lune avec un feu tout blanc mais légèrement incliné ! Le lendemain au petit jour un vent du nord de 20 noeuds nous à gentiment poussés vers Minorque. Comme nous ne voulons pas arriver de nuit, nous avons ralenti en roulant du génois à trois reprises et sommes arrivés à port Mahon le 21 à 7h00.
La
capitale de Minorque nous est parue très touristique pour gens aisés. Avec notre
allure de routard mal rasé et cheveux en bataille (ceux des filles pas ceux du
capitaine !) nous nous sommes fondus dans la masse.
Nous avons trouvé un mouillage sympa dans la Cala
Llonga . Nous pensions que les corps morts étaient privés, mais non. Ils sont
gérés par un marinero qui vient encaisser sa dîme tous les matins. Nous
resterons sur ancre pendant les quatre jours de notre escale. Nous avons appris
plus tard que l'on avait eu de la chance car ils refusent souvent le mouillage
aux bateaux de passage, les obligeant à prendre une place de port ou une bouée.
Mais à notre arrivée, aucune bouée n'étaient disponible. Un superbe voilier
anglais est d'ailleurs venu mouiller prés de nous.
La ville n'est pas très proche de la Cala Llonga et l'on en profite pour roder le moteur de l'annexe. En ville, c'est propre et il nous faut nous mettre à l'heure espagnole : entre 14 et 17 heures tout est fermé !
Nous trouvons un cybercafé et profitons pour envoyer des nouvelles à la famille. Le marché est sympa et au sous-sol se trouve un supermarché. La première fois que nous avons vu le marché, nous le prenions pour une annexe de l'église qui est juste à côté. Après avoir demandé plusieurs fois notre chemin, nous nous sommes décidés à y pénétrer !
Nous avons rencontré l'équipage de Loungta, un voilier en acier de 10 mètres en allant dans un autre mouillage en annexe, afin que les filles se baignent. Ils partaient pour un tour du monde, mais des problèmes de famille les obligent à suspendre le voyage. Nous passerons 2 soirées ensemble et Daniel fera grand effet sur les filles en leur faisant quelques tours de magie. C'est bien dommage que leur voyage s'arrête là, car nous les apprécions beaucoup. Ce sont des gens simples qui aiment croquer ce que la vie peut leur apporter. Nous espérons que leurs problèmes trouveront rapidement une solution et qu'ils nous feront la surprise de nous rejoindre dans un mouillage !
Nous quittons Port Mahon le 25 Août pour la Cala
Covas. Embossage obligatoire tant la calanque est petite. C'est joli, mais une
houle de sud rend le mouillage moyen.
Le deuxième jour, nous resterons seuls au mouillage :
tous les bateaux ont fui le mouillage devenu inconfortable. Le vent étant
contraire à notre prochaine traversée et rejoindre port Mahon serait faire
marche arrière, nous décidons de faire le gros dos. Bien nous en a pris, car peu
après le départ de tout ce beau monde, le vent se calme et la cala devient très
agréable ; et elle est pour nous seuls !
Nous partons le lendemain matin pour Majorque et nous trouvons le soir un mouillage près du port de Porto Colon. Nous envisageons de prendre le bus pour aller visiter Palma mais la mauvaise tenue du mouillage, fond de vase et d'herbe, nous fait renoncer à cette idée. La ville est minuscule mais jolie et s'est transformée en complexe immobilier. Possibilité de ravitaillement au supermarché et cybercafé près du port. La zone de mouillage située à l'ouest, conseillée dans notre guide nautique est désormais totalement occupée par des bouées. Seule la zone Est est disponible aux bateaux de passage.
Le 31 Août nous quittons Colon pour aller mouiller dans le sud à la Cala Caragol. Plage superbe et mouillage tranquille. Il fait super beau. Nous resterons seulement une nuit et partons le lendemain pour l'île d'IBIZA. Au moment du départ l'ancre est bloquée sous un cailloux. Plutôt que de forcer sur le guindeau Jean-Michel plonge pour la dégager. Pas facile et manque d'entraînement pour les apnées. Au bout de quatre essais l'ancre se décroche et c'est entre les méduses qu'il remonte à bord.
L'île d'Ibiza ne nous a pas plu pour ce que nous en avons vu : ne pouvant mouiller devant le port de St Eulalia en raison d'une houle de Sud-Est qui entre dans la baie, nous allons jusqu'à la Cala Llonga (encore une...) un peu au sud. La photo sur notre guide est plutôt sympa. A l'arrivée, ce n'est pas du tout ce qui nous attend : des hôtels partout, des parasols sur les plages, des pédalos qui attendent les touristes... Nous mouillons tout de même au milieu de la Calanque, pour nous reposer de notre nuit de navigation. Le temps de prendre notre petit déjeuner, nous dormons une petite heure. Nous ne resterons pas longtemps tranquilles : de nombreux bateaux remplis à raz bord de touristes passent tout près de nous, à une vitesse terrifiante, nous malmenant comme de vulgaires pantins. Elle repart deux minutes plus tard en nous faisant subir le même sort et est aussitôt suivie par un collègue. C'en est trop ! Nous lançons le moteur, relevons l'ancre et entrons le point GPS de la passe entre Ibiza et Formentera. Cap au sud !
Nous mouillons sur Espalmador au nord de
Formentera après une navigation sous voiles, doublés par de nombreux
motor-yachts pressés de rejoindre leurs congénères. Pour nous, le mouillage se
fait sur bouée (gratuit pour l'instant),
accueillis par un marinero bien
sympathique. Depuis le cockpit du bateau, nous repérons une tribu bizarre de
gens tous gris qui sortent des dunes derrière la plage. Nous comprenons
rapidement qu'ils se sont plongés dans un bain d'argile ; nous nous
empressons de sauter dans l'annexe et d'adhérer à cette nouvelle tribu ! Et à
notre tour, nous indiquerons le chemin à de nouveau adhérents !
Lundi 4 septembre, c'est la rentrée des classes. A l'heure où les enfants de France se dirigent vers leur école, nos filles dorment tranquillement tandis que nous voguons vers le continent Espagnol. Elles ont déjà pris de l'avance sur leur travail, et n'ouvriront pas de livre de classe aujourd'hui. Nous atterrissons à Carthagène, notre premier port depuis Toulon.
Suite au prochain journal de bord...